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Gens du Voyage

et habitants de caravanes résidentielles

 

Groupes et Cultures: Start Omhoog Plan d'action 07-02 Groupes et Cultures - Actualités 2001

Texte publié en 1995. Vueillez nous contacter pour des informations plus récentes.   gypsies @  vmc.be 

Source: http://users.belgacom.net/bn379716/groupes.htm  site en principe fermé

Nouveau site: http://www.vroemvzw.be/ 

 

1. HABITANTS DE CARAVANES RESIDENTIELLES : UN SEUL GROUPE-CIBLE, PLUSIEURS SOUS-GROUPES

 

Les habitants de caravanes résidentielles sont loin de constituer un groupe de population homogène. Les différents « sous-groupes » ont tous leur propre histoire et des caractéristiques (culturelles) spécifiques. Cependant il y a beaucoup de choses qui les rattachent entre eux.

 

I.I. GROUPES

 

- Les Gitans « roms » :

Les individus qui appartiennent à ce groupe sont appelés « Rom » (au pluriel « Roms ». Il est probable que ce soit au milieu du siècle passé qu’ils sont arrivés dans notre pays en vagues successives. Ils vivent d’une manière très nomade, attachent beaucoup d’importance aux liens familiaux et parlent toujours leur langue, le « rom » avec pour seconde langue, le français. Les femmes portent de préférence leur costume traditionnel. Cela contribue à faire d’elles le groupe le plus remarqué, bien qu’elles constituent le groupe le plus petit du point de vue numérique.

 

- Les Gitans manouches :

Les manouches résident dans nos contrées depuis le 15ème siècle. Leur mode de vie ressemble fort à celui des « Gens du Voyage » (voir plus loin). C’est la raison pour laquelle les mariages mixtes, c’est-à-dire entre ces deux groupes ont lieu régulièrement. La première langue qu’ils parlent est leur « manouche », suivie du néerlandais. Aux Pays-Bas on les appelle parfois « Sinti ».

 

_ Les Gens du Voyage

Les gens du voyage sont des belges autochtones qui descendent de commerçants voyageurs et de gens de métiers itinérants. Ceux qui vivent encore en caravanes résidentielles séjournent souvent sur des terrains communaux. Beaucoup d’entre eux vivent dans des maisons, en y étant plus ou moins contraints, mais ils demeurent tant pour eux-mêmes que pour le groupe de véritables « gens du voyage ». En Flandre ils sont néerlandophones.

 

- Les « Roma »

Les Roma sont des gitans d’Europe de l’Est qui se concentrent en Belgique dans les grandes agglomérations d’une manière qui varie fortement selon les saisons. Leur première langue est un langage « Rom » - qui diffère beaucoup d’un groupe à l’autre. La langue suivante qu’ils parlent est la langue du pays dont ils proviennent. La langue du pays où ils ont séjourné en premier lieu (Italie, Allemagne) ne vient qu’en troisième position. Donc le néerlandais n’est que leur quatrième ou cinquième langue. Etant donné la précarité de leur situation au point de vue de leur séjour dans le pays – beaucoup se trouvent dans une situation de procédure d’asile qui est en cours- il leur est impossible d’intégrer le marché du travail et de bénéficier de prestations sociales régulières.

 

- Gitans étrangers

Indépendamment des « Roma » de grands nombres de Gitans provenant des pays de l’Union Européenne traversent la Belgique au cours des mois d’été. Les groupes varient de 30 à 150 caravanes et ils ont souvent des liens familiaux ou sociaux avec les Gitans belges.

 

- Forains, bateliers, gens du cirque…

Ils ne relèvent pas du groupe cible du travail social qui est fait en faveur des habitants de caravane. Au sein de l’aide sociale ils ont élaboré leur propre circuit. Mais cependant beaucoup d’entre eux se rattachent aux Gens du voyage via des liens familiaux ou des activités professionnelles.

1.2. NOMBRES

Nous ne pouvons que donner une estimation du nombre des Gens du Voyage et des Gitans.

 

D’abord il convient de dire que les Gens du Voyage et les Gitans ne veulent pas être inscrits dans des registres. La raison en est que la Deuxième Guerre Mondiale est encore fraîchement gravée dans la mémoire collective. Deuxièmement il n'y a aucune base objective permettant d’identifier les Gens du Voyage et les Gitans. Leur identité ne se trouve pas sur leur carte d’identité mais elle est déterminée socialement. En bref : est Gitan celui qui est considéré comme tel par les autres Gitans. Le « VCW » doit donc établir des estimations sur base d’ « ouï dire » au sein du groupe cible. En plus de cela il nous faut tenir compte des frêles limites entre « Roms », « Manouches », « Gens du Voyage » et citoyens. Dans chaque arbre généalogique on rencontre l’un ou l’autre de ces groupes. C’est pourquoi il est impossible de décrire l’étendue de notre groupe cible, alors qu’il est possible de le faire pour les travailleurs migrants, les réfugiés et les chômeurs de longue durée. Notre expérience dans les régions nous montre que le fonctionnement de notre action attire toujours plus de membres du groupe cible qui jusqu’à présent nous étaient inconnus.

 

Nous évaluons actuellement le nombre de Gitans et de Gens du Voyage en Belgique à environ 10.000 individus. Le nombre d’habitants de caravane qui résident effectivement en caravane s’élève à 750 ménages. En ce qui concerne ceux qui vivent dans des maisons nous n’avons pas une vue complète. Attention : beaucoup d’habitants de caravane vivement temporairement ou définitivement dans des maisons mais restent néanmoins intégrés dans leur milieu d’origine.

La répartition de Gens du Voyage et de Gitans en maisons et en caravanes résidentielles varie beaucoup d’une région à l’autre. Au Limbourg par exemple la moitié des gens du voyage habitent dans des maisons. Dans le « Meetjesland » c’est le cas de quatre-vingts pour cent des gens du voyage. Dans la plupart des régions nous ne connaissons pas la proportion de gens du voyage habitant dans des maisons.

 

Comment arrivons-nous alors à notre chiffre de 10.000 ?

Un comptage complet au Limbourg au début des années ’90 nous donna pour résultat le chiffre rond de 1000 personnes appartenant au groupe des gens du voyage. Par notre action il y a plusieurs ménages qui depuis lors se sont fait connaître comme gens du voyage. En extrapolant aux 5 autres provinces ainsi qu’à Bruxelles nous estimons à 8000 le nombre des gens du voyage. Si nous ajoutons ces 8000 personnes aux 1300 Manouches ainsi qu’aux 700 Roms qui prennent leurs quartiers d’hiver en Belgique alors nous arrivons au nombre arrondi de 10.000 individus.

Le nombre de gitans d’Europe de l’Est est encore plus difficile à estimer. De nos contacts nous pouvons déduire qu’il y a toujours davantage de familles qui séjournent à Bruxelles, Gand, Anvers, Tirlemont et le Pays de Waas. Dans le reste de la Flandre nous les trouvons dans des concentrations plus petites. Ceci nous amène à estimer à 10.000 le nombre de « Romas » d’Europe de l’Est séjournant en Flandre, mais nous devons tout de même considérer ces chiffres avec une certaine prudence.

 

 

2. HISTORIQUE

 

2.1. LES GITANS

 

Du point de vue historique nous considérons que la population tzigane en Belgique se répartit en deux groupes : les Manouches et les Gitans- Roms. Les Manouches sont arrivés dans nos contrées au quinzième siècle. Les Roms par contre n’arrivèrent par la deuxième migration qu’aux environs de 1856. Depuis lors le temps ne s’est pas arrêté. Une troisième migration, celle des Gitans d’Europe de l’Est, est actuellement pleinement en train de s’effectuer.

 

2.1.1. La première migration ou la venue des Manouches.

Cette première migration a lieu au 15ème siècle et annonce la venue des ancêtres possibles des Gitans manouches belges. Déjà depuis le 10ème siècle les Gitans amorcent leurs déplacements de populations depuis l’Inde. Des chercheurs ont déterminé de manière assez exacte le parcours qu’ils ont dû emprunter en étudiant minutieusement leur langue. La langue gitane remonte au Sanscrit (une langue indo-européenne qui appartient au groupe linguistique asiatique) ainsi qu’à d’autres langues que l’on parle encore en Inde de nos jours. Evidemment la langue gitane a absorbé au cours de l’histoire d’innombrables nouveaux mots et expressions. Cette évolution linguistique a permis de reconstituer avec précision la carte de leur migration. Quelle partie de l’Inde est réellement le berceau de ce groupe de gitans, les chercheurs ne sont pas unanimes sur cette question. La raison de leur départ n’est pas claire non plus. La faim, la menace de guerre et la pauvreté sont les raisons que l’on cite le plus fréquemment.

 

Aux environs de 1420 de petits groupes mobiles de gitans arrivèrent aux Pays-Bas. Ils prétendaient être des pèlerins d’une région inconnue qu’ils appelaient « Petite Egypte ». Afin d’étayer leurs dires ils exhibaient souvent des laissez-passer (des sauf-conduits ?) et des lettres de protection (recommandations ?) émanant du Roi de Rome, Sigismund, ainsi que du Pape Martin V et d’autres détenteurs du pouvoir de rang moins important.

 

Au début on leur réserva un accueil chaleureux. Mais cela fut de courte durée. A partir du 16ème siècle l’hospitalité des villes se refroidit. En fait il y avait trop de gitans qui avaient pris la route vers l’Europe Occidentale et les Pays-Bas. Les lettres de recommandation perdirent de leur crédibilité. Auprès des corps de métiers les pratiques commerciales des gitans firent naître un sentiment désagréable. Le résultat de ceci est la promulgation des premiers décrets d’expulsion. Aux Pays-Bas l’autorité menait une politique dure. Aux 17ème et 18ème siècles les gitans de nos régions furent souvent victimes de persécutions massives ou d’une lourde répression, de telle sorte qu’ils prirent littéralement la fuite. Après d’impitoyables parties de chasse à l’homme ils en restèrent bien peu, c’est pourquoi l’autorité ne se donna même plus la peine de les rechercher. Ce n’est qu’aux environs du 19ème siècle que différents groupes de gitans qui avaient été chassés se risquèrent à nouveau dans nos régions. Les persécutions se firent moins dures. Assimiler les gitans à la population et faire disparaître leur culture, tel était le slogan de l’époque. De nos jours les Manouches séjournent surtout dans le triangle Bruxelles- Anvers- Gand. Ils habitent le plus souvent dans une caravane résidentielle sur un terrain familial.

 

2.1.1. La deuxième migration ou la venue des Roms.

La deuxième migration date de la deuxième moitié du 19ème siècle. Après l’abolition totale de l’esclavage en 1856 dans les principautés roumaines de Moldavie et de Valachie (de là leur nom de Roma- Valaches) les gitans- roms partirent pour la Russie et l’Europe occidentale. Il y eut également de nombreux groupes qui quittèrent la Hongrie à la recherche de contrées plus clémentes.

 

Les Gitans- Roms qui arrivèrent en Belgique à cette époque furent surtout repoussés jusqu’en 1933. Les Gitans « étrangers » ne pouvaient pas s’inscrire : ils ne possédaient ni identité ni nationalité. Ils étaient considérés comme des vagabonds. Ils parcouraient notre pays dans tous les sens et c’est grâce à leur esprit très inventif qu’ils réussissaient à survivre.

A partir de 1933 et jusqu’en 1965 ils furent tolérés. Ils reçurent une carte leur permettant de se déplacer, suivie de la déshonorante « carte de gitan », délivrée par le Ministère de la Justice. Cette carte n’était pas un document d’identité mais bien un document leur autorisant un séjour de trois mois en Belgique. Chaque mois les gitans devaient se présenter auprès de la gendarmerie pour y faire viser leur carte.

 

L’occupation allemande fut la plus dure et la plus cruelle période de leur récente histoire. Les Nazis firent usage d’une politique d’extermination. On estime à 250.000 le nombre de Gitans européens qui perdirent la vie dans des camps de concentration allemands.

A partir de 1965 les Gitans obtinrent un statut de résidents permanents. Les expulsions n’étaient plus possibles. Ce n’est qu’en 1975 que la carte de Gitan fut abolie. A partir de ce moment-là ils purent donc se faire inscrire dans les registres de population des étrangers. Ainsi ils eurent enfin une identité. Mais une nationalité c’est encore autre chose ! !

Les Roms d’aujourd’hui vivent, certainement en ce qui concerne l’été, sur un mode très nomade. Leur première langue est le Rom suivi du français. Le néerlandais ne vient qu’en troisième position.

 

2.1.3. La troisième migration

ou l’arrivée des Roma d’Europe de l’Est.

 

La migration de l’Europe de l’Est vers l’Europe de l’Ouest ne s’est jamais arrêtée tout à fait. Cette migration connaît une nouvelle apogée au cours des prises de pouvoir communistes en Europe Centrale et en Europe de l’Est, mais la migration est encore plus forte après la chute du Rideau de Fer. La situation de guerre dans l’Ex-Yougoslavie joue également un rôle. D’après notre évaluation la troisième migration a amené en Belgique autant de tziganes en dix ans de temps que n’en avaient amené les deux migrations précédentes conjointes sur une période de cinq siècles. Ce sont ces nouveaux immigrés que nous appelons les « Roma ». Leur situation de séjour est incertaine. Ils disposent de documents provisoires. Ils n’y a qu’un petit nombre d’entre eux qui ont réussi à obtenir le statut de réfugié. Leur très forte solidarité familiale leur fait préférer une vie d’illégaux en Europe Occidentale à la citoyenneté à l’Est.

Ces « Roma » vivent presque tous dans des maisons mais ils demeurent très mobiles. Déménager d’une ville à l’autre ou d’un pays à l’autre est pour eux monnaie courante.

 

 

2.2. GENS DU VOYAGE

OU ITINERANTS AUTOCHTONES

 

Les gens du voyage ont de tout autres antécédents historiques que les tziganes. Ils descendent de citadins appauvris qui au cours de la première moitié du siècle passé tâchèrent de survivre grâce à une existence itinérante. Des périodes successives de famine condamnèrent en effet de larges couches de la population à une pauvreté sans issue. Les Gens du voyage se distinguaient des vagabonds ou chemineaux (= personnes qui errent sur les chemins et vivent d’expédients, à ne pas confondre avec le mot « cheminots », qui est un homonyme).par le fait qu’ils voyageaient en famille. Parce que ces gens du voyage vivaient dans le même milieu et sur le même marché que les Manouches, nous constatons une grande similitude de coutumes et de culture entre les deux groupes. Des mariage « mixtes » (c’est-à-dire dont les conjoints appartiennent à ces deux catégories) sont très fréquents.

 

Et cependant avant cette époque-là il existait déjà des autochtones itinérants. Des documents historiques, par exemple concernant leur langue, l « Argot» (Argot ancien, note de la traductrice) constituent une indication intéressante. Déjà au 17ème siècle il existait des listes de mots de cette langue. Si nous comparons ces termes avec ceux de l’Argot actuel en Flandre, alors nous constatons que ces mots sont pratiquement identiques. Par contre des points de disparité importants se remarquent par rapport à l’ « Argot » d’autres régions. Et cependant toutes ces variantes comportent des mots provenant du manouche, de l’hébreu, du pays d’origine et des pays environnants. Cela nous donne à penser que les itinérants autochtones ont connu un développement qui leur est propre – à côté du développement des tziganes- et qu’ils se sont transmis leur culture de génération en génération.

 

2.3. LA PLACE DES NOMADES DANS LA SOCIETE SEDENTAIRE .

Au Moyen -Âge des groupes itinérants apportaient toutes sortes de biens du producteur au consommateur. Du fait du manque de magasins la population rurale dépendait de démarcheurs (ou colporteurs) pour s’approvisionner dans certains domaines. Ces démarcheurs étaient fréquemment aussi des hommes de métier, tels que des aiguiseurs de ciseaux, des fabricants de brosses à balayer, des vanniers. Souvent ils transmettaient des nouvelles concernant les villages environnants. Tout cela augmenta leur popularité auprès des villageois.

Mais cela non plus ne dura pas. Une opposition se forma inspirée par la peur des corporations de la ville face à cette concurrence provenant de la campagne. Les mesures d’interdiction de ces gildes eurent cependant peu de résultats étant donné le trop grand besoin de marchands itinérants que créait la piteuse situation économique. Pourtant cette opposition explique partiellement la répression sévère contre tous les groupes itinérants.

Au début les voyages ne se faisaient pas en voiture. On se déplaçait à pied. On passait la nuit dans des tentes ou dans des granges de paysans. Ce n’est qu’à la fin du siècle dernier que les « commerçants itinérants » se procurèrent des charrettes. Au début ils utilisèrent des brouettes, des charrettes élargies d’aiguiseurs de ciseaux et des charrettes à chiens. Ce n’est que plus tard qu’ils adoptèrent des voitures plates et des roulottes bâchées équipées de chevaux. De véritables caravanes résidentielles n’apparaissent qu’après la Deuxième Guerre Mondiale.

La mobilité croissante de chaque citoyen et la baisse des coûts des moyens de production des biens de consommation minent l’intérêt économique que représentent les marchands itinérants. La sédentarisation, la marginalité et la pauvreté s’ensuivront. Conclusion : la flexibilité des tziganes semble forgée par la pression d’une société en évolution rapide où ils sont bien obligés de se débrouiller pour survivre.

 

 

3. HABITANTS DE ROULOTTES : TROIS CARACTERISTIQUES

 

Par habitants de roulottes nous entendons donc : Tziganes et Gens du voyage. Ils sont loin de constituer un groupe homogène. Et pourtant anthropologues et ethnologues ont étudié pendant des siècles leurs caractéristiques communes que l’on peut observer de l’extérieur. Leur auto-identification constitue dans ce domaine le point de départ.

Dans aucune de leurs langues on ne peut trouver un mot qui comporte la notion de « Tzigane ». Pourtant les deux groupes connaissent un mot pour désigner les non –Tziganes. Dans les dialectes roms ce mot est « gadgo », qui signifie paysan, mot le plus répandu. Parmi les Gens du voyage le mot « paysan » est volontiers utilisé dans d’innombrables variations de l’argot.

Un Tzigane se désigne donc lui-même comme « non-paysan ». Cela veut dire qu’il doit exister des éléments nous permettant d’esquisser une identité. Le « Vlaams Centrum Woonwagenwerk » (= VCW) suit dans cette recherche de l’identité du Tzigane le mode d’approche d’Alain Reyniers (1) (remarque : la citation que l’on trouve sur la couverture est également d’Alain Reyniers). Alain Reyniers est anthropologue à l’Université de Louvain-la-Neuve. Trois caractéristiques sont fondamentales dans cette approche :

 

1. Nous et Eux

2. Ici et Maintenant

3. Flexibilité

 

Même s’il n’y a qu’une petite partie de la population des Tziganes et des Gens du Voyage qui parcourt encore les routes, il nous faut cependant continuer à considérer leur culture à la lumière d’une existence nomade.

Enfin nous devons aussi nous rendre compte que ces caractéristiques ne s’appliquent pas à chaque Tzigane et à tous les Gens du Voyage. La place de l’individu et la société dans laquelle il se trouve jouent également un grand rôle dans ce domaine.

 

3.1. NOUS ET EUX

 

« Il y aura toujours un mur entre toi et moi » (Un Rom à Anvers).

Le clan constitue la base de la société nomade. Ce clan est basé sur des liens étendus de famille ou de groupe où sont également intégrés des personnes qui ne sont pas apparentées au groupe par des liens de sang. Ces clans forment un groupe uni face à la société des citoyens. C’est pourquoi Reyniers voit une distinction fondamentale entre « nous » (les Tziganes et les Gens du Voyage) et « eux » (les citoyens). Cette distinction est quelque chose qui relève surtout de la sensibilité et qui est très profondément ancré. La conséquence de cette distinction est une méfiance fondamentale à l’égard de tout ce qui vient de l’extérieur. Il est difficile de trouver des causes à cela. Parfois ce sont des faits objectifs et parfois ce sont de purs préjugés qui font naître une attitude de rejet réciproque entre l’habitant de la roulotte (ou de la caravane résidentielle) et la société environnante.

 

3.2. ICI ET MAINTENANT

L’existence nomade cela signifie voyager. Le fait de n’avoir d’obligation ni de temps ni d’espace découle de ce mode d’existence. Les habitants des roulottes vivent dans un présent perpétuel. Ils font peu de projets à long terme. Vivre, travailler et habiter forment une entité. C’est pour cela que la division des « sphères de vie » de la société citoyenne, (c’est-à-dire la division : école, travail, la maison, les loisirs, la religion) est un cloisonnement très dissonant par rapport à leurs conceptions de vie. La grande confiance dans « la chance » s’intègre bien dans cette mentalité. A propos de la santé ils disent souvent par exemple « j’ai la chance de n’être pas malade ».

 

3.3. FLEXIBILITE

Tirer son plan en toutes circonstances est un slogan que les habitants des roulottes entendent depuis leur plus tendre enfance. Chacun doit pouvoir réagir promptement et efficacement aux évènements qui surviennent. C’est pourquoi les jeunes doivent savoir plusieurs métiers, acquérir une grande perspicacité en ce qui concerne l’âme humaine et réussir à se maintenir dans toutes les situations possibles et quelles que soient les relations sociales qu’ils sont amenés à côtoyer. Leur fierté doit devenir leur qualité de base. Si aujourd’hui un métier n’est plus payant, demain ils en exerceront un autre (voitures d’occasion, ferrailleurs, commerce ambulant). Travailler comme salariés ne les attire pas. Le travail d’indépendant, voilà ce qu’ils trouvent bien.

 

 

4. CARACTERISTIQUES CULTURELLES

 

4.1. MODE D’HABITATION

4.1.2. NOUS ET EUX

Au cours de l’histoire le mode d’habitation des habitants des roulottes s’est beaucoup modifié. Granges, tentes et charrettes durent céder la place aux mobilhomes, roulottes et chalets. Leur mode d’habitation mobile constitue pour les Gens du Voyage belges et pour les Tziganes le symbole par excellence du fossé entre eux-mêmes et les sédentaires. C’est là un des derniers signes extérieurs de leur identité. Le mot « habiter » a pour eux un autre sens. Le cœur de ce concept d’ « habiter » pour eux, c’est : habiter ensemble en groupe. La « famille nucléaire » qui habite dans une maison, c’est quelque chose qu’on ne trouve que rarement chez eux, et souvent à titre provisoire. C’est pour cela qu’ils s’attachent moins à un endroit déterminé. Cependant des changements à l’intérieur du groupe peuvent jouer un rôle. En fonction de ces changements ils élisent un lieu de séjour. Le contexte local de la société des citoyens (vie de quartier, vie associative, infrastructure sportive,…) ne constitue pas un facteur décisif dans ce choix. Cependant on peut dire qu’il y a de plus en plus d’habitants de roulottes qui vont habiter dans une maison parce qu’ils y sont vraiment obligés. La raison de cette obligation c’est le manque de places pour s’établir (avec la roulotte) mais également la discrimination dont ils sont victimes de la part de la société des citoyens. Parfois le besoin d’un plus grand confort joue également un rôle. Il y a des familles qui échangent leur caravane contre un chalet et parfois contre une maison. Malgré tout ils continuent de se qualifier eux-mêmes d’ « habitants de caravane ».

 

EXEMPLES

Les Tziganes et les gens du voyage vivent en groupe familial.

Parce qu’ils veulent éviter de fréquenter des citoyens, ils évitent souvent les campings officiels. D’ailleurs le plus souvent on les refuse dans ces campings officiels.

Arrangement de la caravane. Les Tziganes et les gens du voyage ont leur manière bien à eux d’arranger leur habitation. On retrouve ce style dans les caravanes (voir également le point 4.2. L’aspect ménager).

Il y a une préférence manifeste du groupe pour certaines marques de voitures et de caravanes, cette mode aussi peut varier.

On constate souvent des troubles psychosomatiques chez des Tziganes et des Gens du Voyage. Souvent ils ont alors recours à des ecclésiastiques qui viennent réciter des prières dans la maison, parfois plusieurs fois par an.

 

4.1.2. ICI ET MAINTENANT

La vie des habitants des « maisons roulantes » se déroule dans le « ici et maintenant » (= culture de survie). Dans leurs manières traditionnelles d’habiter cela se retrouve également. Habiter c’est quelque chose qui est temporaire et qui est assujetti aux changements sociaux et familiaux du moment. C’est pourquoi nous disons plutôt qu’ils « se trouvent » quelque part. Aujourd’hui ils séjournent sur le terrain A dans la ville B et quelques semaines plus tard ils habitent dans la maison C dans la ville D.

 

EXEMPLES

Les Tziganes et les Gens du Voyage déménagent parfois dix fois par an.

Même acheter une maison n’est pas quelque chose de définitif.

Lorsqu’ils ajoutent des annexes à la maison ces constructions supplémentaires ne sont pratiquement jamais faites en matériaux durables.

Lorsque l’on a besoin d’argent on peut vendre la caravane.

On constate souvent que des Tziganes et des Gens du Voyage prennent en location ou achètent une maison et qu’ils vont s’installer derrière la maison dans leur caravane.

 

4.1.3. Flexibilité.

La roulotte est une forme d’habitation flexible. La maison roulante est relativement bon marché, aisément déplaçable et rapidement négociable. Ceci illustre bien leur culture de survie, basée sur la flexibilité. N’être jamais tranquille et se sentir toujours pourchassé est une situation qui est très intimement liée à cette culture de survie. Les habitants des maisons roulantes déménagent souvent à cause de la pression de la société. Cela exige évidemment la flexibilité voulue (moyens financiers, discrimination lors de la location de maisons, problèmes familiaux, disputes familiales,…)

 

EXEMPLES

Une famille achète une maison. Ils effectuent une rénovation complète de la maison, mais après cela ils déménagent à cause de difficultés rencontrées avec la famille qui habite dans le voisinage. L’envie de se remettre en voyage peut aussi avoir pour résultat qu’ils revendent à nouveau tout.

 

4.2. MENAGE

 

4.2.1. Nous et eux.

Les Tziganes et les Gens du Voyage utilisent des éléments du « monde des citoyens » pour composer leur style de vie qui est typique. Parce que beaucoup d’entre eux ne voyagent plus beaucoup ils arrangent leur maison roulante ou leur chalet de manière plus riche (plus cossue) que ce n’était le cas auparavant. Ils aiment les meubles garnis de beaucoup d’ornements, les rideaux somptueux, les statuettes en porcelaine, les miroirs et autres objets brillants. On reconnaît tout de suite la maison ou la voiture d’une personne appartenant aux Gens du Voyage. Les statuettes en plâtre, les fleurs en plastic et les housses lavables pour canapés sont très à l’honneur chez ces nomades. Une habitation où on ne trouve pas cela manque de style et d’âme.

Faire impression sur la famille et les amis cela joue également un rôle.

Les Tziganes qui voyagent ne possèdent pas tellement de petits accessoires parce que ces objets ne restent pas droits pendant les déplacements. Et pourtant ceux-là aussi attachent beaucoup d’importance à l’arrangement de leur voiture.

 

L’intérieur doit toujours être impeccable.

Nouveau et brillant sont les mots- clé. L’habitation est nettoyée chaque jour de manière approfondie. Si un objet est un peu usé ou qu’il est en usage depuis longtemps il est remplacé par de nouvelles choses. Ces choses-là sont pures et ne sont pas « contaminées » par toutes sortes d’impuretés qui rentrent. Ces impuretés proviennent le plus souvent de personnes extérieures, de citoyens ou de visiteurs indésirables. On utilise de l’eau de Javel pour nettoyer une tasse dans laquelle un citoyen a bu. Cette forme de propreté est fort liée à la notion de « marimé » (= pureté, voir le chapitre traitant de la santé). Tout ce que touchent les personnes qui ne sont pas des habitants des caravanes résidentielles est quelque chose d’impur. Purifier signifie observer des règles fort strictes. L’angoisse est en effet très vive que les citoyens en touchant ne transmettent des choses mauvaises (par exemple des bactéries ou des esprits malfaisants).

Les invités que l’on aime bien sont reçus de manière très chaleureuse. Le fait que l’on vous offre une tasse de café ou un repas que l’on vous invite à partager avec le groupe sont des signes que vous êtes accepté. Refuser correspond dès lors à refuser leur hospitalité. Les habitants des caravanes attendent de leurs invités que ceux-ci s’en tiennent aux règles en vigueur dans le ménage des nomades. Il faut garder le silence concernant les sujets qui sont impurs ou qui sont « marimé » et il faut ôter ses chaussures avant d’entrer dans la caravane, pour citer quelques exemples.

 

4.2.2. ICI ET MAINTENANT

Les Gens du Voyage suivent une mode qui leur est propre pour la décoration de leur intérieur. Cela coûte de l’argent. Celui qui a les moyens, il est bien intégré. Celui qui n’a pas les moyens décore alors son intérieur au moyen d’objets reçus de la famille ou d’amis ou encore au moyen d’objets qui sont plus petits et payables.

 

L’intérieur comme aussi la voiture avec laquelle on roule déterminent le statut de quelqu’un. On intègre chaque année les nouvelles tendances de la mode, on renouvelle les meubles.

Pour les Tziganes les tout nouveaux modèles de caravanes jouent un rôle important. Les caravanes résidentielles sont vites renouvelées et tout le matériel de maison est dès lors également remplacé. Une caravane qui a plus de cinq ans n’est plus à la mode.

 

Les personnes qui sont bien reçues aujourd’hui peuvent demain ne plus être les bienvenues. La raison possible à cela : l’invité a dit quelque chose ou il a fait quelque chose que les habitants de la caravane n’acceptent pas. Les gens de l’extérieur commettent facilement des erreurs parce qu’ils ne sont pas informés sur les règles et les tabous. C’est par eux-mêmes qu’ils doivent apprendre ces choses. Si les Tziganes et les Gens du Voyage constatent qu’un citoyen fait de son mieux pour s’adapter à leur mode de vie alors il est accepté plus facilement.

 

4.2.3. Flexibilité

En ce qui concerne le ménage des règles de propreté très strictes sont observées. Mais dans les autres domaines qu’en est-il de cette propreté ? On a parfois l’impression que là toute règle fait défaut. Les enfants de Gens du Voyage et de Tziganes circulent parfois avec des habits sales, des mains et des pieds tout noirs, les cheveux non peignés et les dents jamais lavées. Le plus souvent c’est cette image là des nomades que les « citoyens » gardent en mémoire.

L’environnement qui borde la caravane est parfois parsemé d’immondices provenant des voyages. Mais cet environnement est pour le nomade la propriété des citoyens. Les citoyens doivent prendre les mesures adéquates (placer des containers etc…) lorsque des habitants de caravane viennent s’installer. Un ramassage hebdomadaire des immondices permet vite de maintenir propre le terrain où les caravanes sont installées.

 

4.3. ENSEIGNEMENT

 

4.3.1. Nous et Eux

L’école appartient fondamentalement au monde des citoyens. C’est bien la raison pour laquelle les Gens du Voyage et les Tziganes considèrent l’école avec autant de méfiance. Ils considèrent en effet qu’à l’école les enfants « courent le risque » d’acquérir des manières de citoyens, ce qui constitue un danger pour la culture des Gens du Voyage et des Tziganes.

C’est ainsi que des conflits éclatent fréquemment entre l’école et le groupe cible. L’école offre peu d’intérêt pour eux, une des raisons est que la matière est trop difficile pour les parents et que ceux-ci ne comprennent pas ce que les enfants sont occupés à apprendre. Les enfants traversent souvent une crise d’identité. A l’école ils taisent leur origine et à la maison ce qu’ils apprennent n’est pas apprécié.

L’école est quelque chose que les Gens du Voyage et les Tziganes ne supportent pas. Un bâtiment stable, construit en pierres, à l’intérieur duquel il faut écouter ce que dit un citoyen et où tout est déterminé à l’avance et où tout se déroule à des moments bien précis fixés d’avance, c’est vraiment quelque chose qui se heurte à cette flexibilité qu’on leur a fait assimiler en même temps que le lait maternel.

 

_ A la maison tout est flexible à tous points de vue. On part avec ou sans la caravane quand et où on veut (par exemple en cas de maladie d’un membre de la famille, ou pour assister à un enterrement,…°).

_L’entraînement à l’obéissance ne fait pas partie non plus de la culture des Gens du Voyage et des Tziganes. Alors en plus de cela, obéir à un citoyen encore bien, cela pose vraiment problème. Souvent on constate que les Gens du Voyage et les Tziganes se sentent lésés, et dans ce cas ils ressentent cela comme la confirmation du sentiment que l’ »on ne veut pas d’eux ».

 

_ Vivre, travailler et habiter forment à la maison une entité.

Les activités se déroulent quand cela est nécessaire, indépendamment d’un temps et d’un lieu. Vous mangez quand vous avez faim. Si vous êtes fatigué, vous allez dormir.

_ Les Gens du Voyage et les Tziganes n’ambitionnent pas une position centrale dans la société. « Nous ne devons pas devenir avocat ou ministre », est une phrase qui revient souvent. Or il se fait que l’enseignement est souvent basé sur un tel planning de carrière.

 

4.3.2. Ici et Maintenant

Comme beaucoup d’autres institutions l’enseignement est pour les habitants des caravanes un simple instrument : l’école sert à apprendre à lire, à écrire et à calculer. La culture générale c’est du lest dont on peut se débarrasser. L’utilité de l’enseignement n’est pas reconnue (les nomades ne se rendent pas compte de cette utilité et ils ne valorisent pas l’enseignement) et cela freine énormément leur motivation.

Dès l’âge de la puberté les enfants sont intégrés à la vie professionnelle de leurs parents. Cela a pour conséquence que les absences à l’école augmentent avec l’âge. Grâce à l’inscription dans une école on est en règle avec la loi d’obligation scolaire, mais les jeunes de 16-18 ans évitent d’aller encore à l’école.

 

4.3.3. Flexibilité.

Les Tziganes et les Gens du Voyage ne se sentent pas vite liés à un institut, donc pas non plus à une école. La conséquence de ceci est que les habitants des caravanes changent fréquemment d’école, le plus souvent à l’occasion d’un conflit.

L’enseignement à temps partiel attire fortement la jeune génération des Gens du Voyage et des Tziganes.

Malgré qu’ils aient souvent les capacités de suivre des orientations plus prometteuses, les jeunes nomades accordent davantage d’importance à la liberté que représente pour eux l’enseignement à temps partiel qu’aux chances possibles d’une belle carrière qu’offrent les autres orientations.

 

Les Gens du Voyage et Tziganes qui voyagent (par exemple la plupart des Roms belges), sont souvent dans l’impossibilité d’envoyer leurs enfants à l’école. Dans le système d’enseignement en vigueur en Flandre, rien n’est prévu pour ces enfants.

 

4.4. TRAVAIL

 

4.4.1. Nous et eux.

Le réseau social constitue la base de l’économie tzigane. Il faut disposer d’énormément d’informations et d’informations très diversifiées pour pouvoir toujours conclure à temps la transaction qui est intéressante.

 

Les nomades se déplacent en groupe familial et ils arrivent toujours dans un environnement étranger où règnent d’autres coutumes. La première chose à laquelle ils peuvent pour ainsi dire se raccrocher est leur propre entourage, qui leur est familier, à savoir : la famille (= qui correspond au « Nous »). De l’entourage étranger, souvent hostile (= qui est le « Eux ») ils se distancient et ils limitent leurs contacts à ce qui représente pour eux une certaine utilité. C’est ainsi que leur réseau social s’étend au-delà de la famille, ce qui est indispensable pour leurs revenus.

 

« Le Tzigane cultive le paysan comme le paysan cultive son champ. Les méthodes d’agriculture peuvent varier de l’agriculture sauvage aux techniques de récolte écologiques. » Ces déclarations illustrent le système économique des Tziganes. La plupart des Gens du Voyage et des Tziganes réussissent –parfois après plusieurs générations- à construire une relation équilibrée avec leur entourage. Ceux qui n’y arrivent pas (ou pas encore) créent une mauvaise réputation aux personnes de leur « peuple ».

 

Les Tziganes et les Gens du Voyage préfèrent par dessus tout travailler en tant qu’indépendants. C’est de cette manière qu’ils réussissent le mieux à combiner l’acquisition de leurs revenus avec l’occupation de leur temps et leurs obligations sociales. En outre travailler sous l’autorité d’un « gadgo » (=paysan) n’est vraiment pas souhaitable à leurs yeux. Le travail salarié est de ce fait (du moins actuellement) considéré comme acceptable à condition d’être temporaire.

 

Et cependant le travail salarié représente toujours plus d’intérêt pour les habitants des caravanes au fur et à mesure qu’ils se « citoyennisent ».

 

C’est ainsi que l’emploi en tant qu’intérimaire (sans lien) ou dans le secteur du travail social constitue un premier pas vers un travail stable.

 

Le nomadisme a aussi (ou avait aussi) ses métiers ambulants typiques qui ne sont pas liés à des lieux fixes et n’exigent ni investissements ni formation. De là les activités telles que : démarcheurs, travailleurs saisonniers (dans l’agriculture, les kermesses), les petits métiers (la réparation d’outils domestiques, aiguiser des ciseaux ou des foreuses) ainsi que le métier de ferrailleur. Ces activités traditionnelles à petite échelle disparaissent parce qu’elles sont trop peu rentables.

 

4.4.2. Ici et Maintenant

Dans les activités traditionnelles on retrouve encore la relation travail- produit- paiement. Dans les grandes entreprises chacun a son « morceau de travail » particulier, et l’on perçoit son salaire (fixe) par quinzaine ou par mois. Considéré du point de vue de la mentalité du « Ici et Maintenant » ce système pose problème pour les habitants des caravanes parce que la « relation directe » a disparu. C’est la raison pour laquelle le travail salarié ne les attire que peu.

Une caractéristique fondamentale de l’économie tzigane est de fournir un travail ou d’offrir des services au plus offrant et à celui qui offre également le plus vite.

 

Même en Europe de l’Est où les « Roma » ont été obligés pendant des décennies à un travail salarié, cette économie tzigane typique reprend cours à présent.

 

4.4.3. Flexibilité

Chez les habitants des caravanes c’est la mission même de la vie d’un homme que de veiller en toutes circonstances à la survie de sa famille. Il doit s’y connaître dans plusieurs métiers pour pouvoir faire face à des demandes diverses. Ceci s’exprime le mieux par des activités indépendantes dans les « niches » de l’économie « citoyenne », dans ces segments du marché qui n’exercent aucun attrait pour la plupart de nos concitoyens parce qu’il s’agit de travaux trop sales, trop irréguliers ou trop misérables.

 

La flexibilité est une qualité décisive dans les processus de négociation avec le « gadgo ». La richesse d’un Tzigane croît ou diminue au contraire selon qu’il réussit à convaincre plus ou moins de « gadge » de faire du commerce avec lui. Bien négocier cela signifie évaluer correctement les sensibilités et y réagir de manière alerte et assertive (= avec confiance en soi). Toute l’éducation est orientée vers l’acquisition de cette habileté (voir aussi le chapitre 3, l’Enseignement).

 

Malgré leur grande flexibilité les Gens du Voyage et les Tziganes rencontrent beaucoup de difficultés sur le marché du travail.

 

Travailler dans le domaine des produits de haute technologie (par exemple des autos modernes) exige une formation adéquate et des ateliers bien équipés. Le concept de « travail » est en effet lié au concept d’ »enseignement » en ce qui concerne la formation nécessaire et a également des liens avec le concept de « logement » quand nous parlons des ateliers. Nous constatons également que la (sur)réglementation en matière d’environnement, préceptes en matière de logement et T.V.A. constitue pour eux une entrave parce que tout cela suppose une bonne instruction et un suivi administratif.

 

4.5. LA RELIGION

4.5.1. Nous et eux

La religion, l’existence d’un Dieu et l’existence du Mal font partie intégrante de leur vie. Ils ont recours à des rituels pour conjurer le Mal et pour gagner Dieu à leur propre cause. Ces pratiques se retrouvent dans différentes expériences religieuses mais également dans des croyances que l’on ne peut pas vraiment qualifier toutes de religieuses. Ainsi des rituels sont pratiqués pour obtenir une grâce ou pour qu’un ennemi soit frappé d’un malheur.

 

Cependant beaucoup d’habitants des caravanes ne se sentent pas rattachés à une structure ou Eglise établie. Les rites religieux tels que pèlerinages, baptêmes, enterrements, confirmation ont lieu à l’intérieur de leur propre groupe. N’oublions pas que l’institution Eglise appartient au monde du gadgo, au monde des paysans.

 

Différents courants religieux peuvent très bien coexister harmonieusement dans une même famille : les grands-parents peuvent être catholiques, les parents protestants et les enfants non-croyants. Les liens familiaux sont plus importants que les rites religieux pour l’identité des Gens du Voyage et des Tziganes. Pourtant l’idée d’ « appartenir tous ensemble au même rite religieux » a la faveur de beaucoup d’entre eux.

 

Les Gens du Voyage déclarent souvent appartenir à la religion catholique. Leurs propres aumôniers organisent des pèlerinages, surtout pendant la saison des voyages, et au cours de ces expériences religieuses les Gens du Voyage vivent leur foi entre eux. Le sentiment d’appartenir au groupe relie les participants.

 

Les Roms par contre appartiennent souvent à un mouvement Pentecôtiste (protestant) de leur propre groupe. Des prédicateurs (pasteurs) provenant de leur propre famille, président les services religieux. Ils se rassemblent deux fois par semaine. Pendant la saison des voyages ils organisent souvent des « conventions » (pèlerinage) qui ont presque toujours un caractère international. Lors de ces cérémonies on baptise sur place.

 

Naguère la foi des Manouches était proche de la foi catholique des Gens du Voyage. Actuellement cependant plusieurs groupes suivent le mouvement Pentecôtiste interne (protestant). La pratique de cette religion se déroule en parallèle avec la foi des Roms, même si les deux groupes vivent leur foi séparément.

 

La religion leur confère donc un caractère qui leur est propre, tant vis-à-vis du monde extérieur qu’en ce qui concerne les différents groupes entre eux. Chaque groupe prétend que sa foi à lui est la Vraie et il puise de cette foi commune au groupe son identité de groupe. Et voilà la raison pour laquelle les Gens du Voyage se rendent peu aux activités de la vie paroissiale de leur voisinage. Pour les baptêmes ils font appel à leurs propres aumôniers ou bien ils attendent un pèlerinage pour pratiquer ce rituel. La première communion est également fêtée entre eux. Les groupes protestants ont leurs propres prédicateurs. Ceci marque bien leur distance par rapport à la société des citoyens et attise leur conscience de former une ethnie. La foi protestante en Belgique est de ce fait structurée suivants ces groupes ethniques. Les Manouches et les Roms connaissent leurs propres pasteurs et leurs propres réunions.

 

Les catholiques vénèrent la Sainte Vierge. Les protestants ne le font pas. Etant donné le caractère universel de la vénération de Marie qui existait auparavant auprès de presque tous les Gens du Voyage et Tziganes, il y a là une rupture de tradition qui est assez remarquable. Certains y voient une tentative de faire reculer la position plus ou moins forte de la femme (cette position forte de la femme existe certainement chez les Manouches).

 

4.5.2 Ici et Maintenant.

Comme la relation des habitants des caravanes avec le citoyen est une relation d’ » écologie/économie » , de la même manière la relation avec Dieu et le Mal est également déterminée par l’utilité qui peut en résulter. La religion est surtout utile pour obtenir des avantages et conjurer des malheurs. La chance et la malchance sont souvent le résultat de la tenue des promesses faites, faire brûler des cierges, participer à des pèlerinages (dans un environnement plutôt catholique) et formuler des prières de demandes au cours de célébrations (environnement protestant). Ici également une vision magique du monde constitue le fondement de la relation avec le surnaturel. Voilà quelque chose qui revient toujours : rendre compréhensible, tangible ce qui est incompréhensible. Ceci vaut aussi bien pour les Roms que pour les Manouches et les Gens du Voyage. De là sans doute le succès de personnages qui pratiquent la religion de manière plus ou moins dissidente :les exorcistes, les guérisseurs, etcétéra.

 

Les catholiques insistent beaucoup plus sur l’éthique comme partie intégrante de la religion que ne le font les protestants. Concrètement le message des prêtres catholiques contient nombre de préceptes valables pour la vie quotidienne en communauté. Les protestants vivent plutôt leur religion de manière « verticale », à savoir le lien personnel de l’individu avec Dieu. La conversion d’un individu au mouvement chrétien va souvent de pair avec un changement moral spectaculaire comme par exemple : cesser de boire, ne plus être violent. Ceci est souvent ressenti comme une intervention personnelle de Dieu, que l’on peut comparer avec une guérison, ou une vocation.

 

Et cependant nous constatons que le lien entre la religion et la morale est assez souple. Le fait d’exprimer son amour du prochain dans l’église n’empêche pas l’éclatement d’une terrible dispute avec le voisin un peu plus tard. En ce ceci en fait les nomades sont peu différents des citoyens.

 

4.5.3. Flexibilité.

Dans le domaine religieux aussi les habitants des caravanes font preuve de flexibilité.

Certains Manouches se convertissent à la foi protestante pour retourner quelque temps après à la sécurisante Eglise romaine. D’autres convertis sentant approcher la fin de leur vie font appel à des aumôniers catholiques pour les derniers sacrements et leur enterrement.

 

Nous retrouvons également à des « conventions » de leurs frères de races protestants, des Gens du Voyage et des Tziganes, qui sont des catholiques convaincus. Leur présence ne constitue pas un problème, pour aucune des deux parties. Un habitant de caravane, qui est catholique, peut sans problème participer à une prière de groupe d’une famille de Roms protestants.

 

Certains « Roma » mohammédans se rendent sans problème à des lieux de pèlerinage catholiques consacrés à Marie.

 

Nous constatons également que des Tziganes adoptent la religion de la société sédentaire où ils séjournent. C’est ainsi qu’en Europe occidentale ils sont catholiques, en Bosnie et au Kosovo ils sont musulmans, tandis que les Tziganes d’Europe de l’Est peuvent être orthodoxes.

 

Il est cependant remarquable que des Gens du Voyage et des Tziganes soient catholiques dans des pays tels que l’Angleterre, les Pays-Bas, l’Allemagne.

 

Comme dans tous les groupes de population nous constatons également chez les Gens du Voyage et les Tziganes une déchristianisation. Cette tendance est peut être plus forte chez les Gens du Voyage parce que chez eux la religion représente moins une plus-value ethnique. Cela n’empêche pas que beaucoup d’éléments de la croyance populaire continuent à déterminer leur vie chez les Gens du Voyage aussi, alors que ceux-ci n’assistent jamais à des offices religieux.

 

Exemples :

- Un Rom devait se rendre à l’église pour faire baptiser son enfant. Il avait un rendez-vous avec un prêtre dans une église catholique sur la place communale. Arrivé là il constata que l’église protestante était plus spacieuse que l’église catholique. Son enfant a été baptisé protestant.

- Un couple catholique plus âgé dont la fille devient une fervente adepte du Mouvement Pentecôtiste sympathise avec l’enthousiasme de leur fille. Cependant, d’après eux ils ne peuvent pas eux-mêmes se convertir à cette religion, parce que leurs propres parents, qui sont décédés, ne peuvent plus donner l’autorisation à cette conversion.

 

- Les Vandria norvégiens (Sinti) sont protestants, et pourtant la vénération des saints et de Marie, ne leur pose aucun problème.

 

4.6. LA SANTE

 

4.6.1. Nous et eux

Chez les Tziganes et les Gens du Voyage la notion de «pureté » ou « marimé » occupe une place importante dans leur vie. Beaucoup de leurs actions suivent un code d’hygiène. Par exemple lorsqu’ils font la cuisine les pommes de terre ne sont jamais mises dans un bac destiné à la vaisselle. La viande doit être méticuleusement nettoyée avant d’être préparée pour la consommation. Une tasse dans laquelle un citoyen a bu doit être nettoyée séparément au moyen d’eau de Javel.

 

La notion de marimé joue également un rôle en ce qui concerne l’aspect corporel de la vie. En matière de santé parler des parties génitales est quelque chose de tabou. La conséquence de cela : les femmes Tziganes qui sont enceintes n’ont pas l’habitude de se faire suivre médicalement pendant leur grossesse. Lorsque la femme a ses menstruations il faut également observer certaines coutumes.

 

Le fossé qui existe entre eux et les citoyens cause également des problèmes. Lors des consultations à l’O.N.E. (Œuvre national de l’Enfance), une femme Tzigane n’acceptera pas de déposer son enfant sur la table d’examen si très peu de temps auparavant un citoyen a été en consultation. Tout ce que les citoyens touchent devient impur. De là également leur angoisse d’aller à l’hôpital.

 

Ce fossé entre les nomades et les citoyens se retrouve actuellement moins chez les Gens du Voyage. En ce domaine ils sont plus souples.

 

4.6.2. Ici et Maintenant.

La santé est un sujet important pour les Tziganes et les Gens du Voyage. Dieu ou le sort décide si vous allez ou non être malade. Si vous priez beaucoup et que vous êtes dans les bonnes grâces de Dieu alors vous allez guérir. Les médecins et la médication sont alors mis de côté. Un rendez-vous chez le médecin, fixé quelques jours auparavant, n’est plus respecté.

 

La prise correcte de médicaments constitue un problème à la lumière de ce qui vient d’être dit. Si aujourd’hui vous vous sentez mieux, alors cela signifie que vous êtes guéri et vous n’avez plus besoin de prendre les pilules et les poudres. Les médecins traitants se heurtent évidemment à une telle mentalité qu’ils ne comprennent pas.

 

Dans ce cadre les soins médicaux préventifs ont peu de succès auprès des nomades. Les problèmes qui se situent dans l’avenir sont des problèmes qui n’existent pas. La santé est évaluée à court terme. Insister pour que vous cessiez de fumer ou pour adapter la nourriture cela n’a pas de sens si aujourd’hui vous êtes en bonne santé. Ce qui se passera dans l’avenir ce sont des soucis pour l’avenir.

 

Parce que les habitants des caravanes omettent de prendre beaucoup de médicaments qui leur ont été prescrits, ils disposent d’une pharmacie de maison assez importante. Ils n’est pas rare qu’ils se passent des médicaments les uns aux autres, ils établissent eux-mêmes un diagnostic et administrent alors la médication qui convient à ce diagnostic.

 

4.6.3. Flexibilité

Il arrive souvent que des habitants de caravane fassent confiance à un « voyant » qui leur prédit leur santé. En cas de mauvaise nouvelle un examen par un médecin suit ou ne suit pas la prédiction.

 

 

5. L’ACTION HABITANTS DE CARAVANE EN FLANDRE

 

5.1. TRAVAIL AUPRES DES FORAINS

L’aide organisée en faveur des habitants de caravanes date de l’année 1868 lorsque fut créée l’Oeuvre Foraine / Foorwerk à Anvers. Cette œuvre vit le jour à l’initiative d’un Père Capucin en collaboration avec un certain nombre de personnes appartenant à la couche supérieure de la société.

 

En peu de temps surgirent partout en Flandre de petits noyaux de volontaires qui se mirent à aider les forains de leurs conseils et aussi de leurs actes. Ces noyaux travaillaient de manière très indépendante les uns des autres. Ces volontaires s’adressaient aux voyageurs forains mais à cette époque cette appellation englobait également les Gens du Voyage et les Tziganes. Parmi ces populations régnait une très grande pauvreté.

 

Le fonctionnement en plein épanouissement se caractérisa par une combinaison d’apostolat et de patronage. Cette œuvre se situe bien dans le cadre d’une tendance de l’Eglise à cette époque, qui consistait à affermir sa position dans la société par la création d’innombrables fraternités et congrégations laïques. Cela était une réaction à la décléricalisation grandissante, surtout après la prise de pouvoir par les libéraux en 1947.

 

Ces noyaux se dispersèrent dans toute la Flandre, mais toutefois sans beaucoup d’organisation et de coordination. Après 1910 le Cardinal Mercier, entre autres, tenta d’apporter une plus grande structure à l’Oeuvre. Cependant après la Première Guerre Mondiale le fonctionnement de ces noyaux diminua peu à peu.

 

Juste avant la Deuxième Guerre Mondiale de nouvelles initiatives virent le jour : le prêtre De Baere essaya au moyen des « Hoogdagen » (=jours de célébration) de rassembler les Gens du Voyage et les voyageurs forains. Mais lorsqu’il voulut mordicus également faire suivre l’enseignement aux enfants en les mettant dans des internats cette fois-là la partie était réellement perdue. Les « hoogdagen » (= jours de célébration) innovèrent une tradition de pèlerinages.

 

5.2. L’ETAT DE BIEN-ETRE

 

Après la Deuxième Guerre Mondiale les Tziganes et les Gens du Voyage furent confrontés à des problèmes d’un genre nouveau. L’Etat de Bien-Etre et l’Etat de Soins vit le jour, l’administration croissante exigea que l’on s’y prenne d’une autre manière.

 

Les forains développèrent l’organisation d’un syndicat pour améliorer leur situation et mettre sur pied une aide sociale efficace. L’apostolat continua d’exister par les aumôniers et les caravanes- chapelles.

 

Les Gens du Voyage et les Tziganes firent appel à toutes sortes de personnes pour se faire aider.

 

La transformation du paysage rural en paysage citadin, la mobilité, le développement technologique, la naissance de la société consommatrice de produits qui sont jetés après usage, et l’arrivée des supermarchés, redessina complètement le paysage des habitants de caravanes. La vie ne devint pas plus facile pour eux. Pour les aider les volontaires furent obligés d’investir toujours davantage et de se plonger dans les textes des réglementations. C’est dans les années ’60 que les premières ASBL s’occupant d’actions en faveur des habitants de caravane virent le jour.

 

Le développement de l’ « Etat de bien-être et de soins » accrédita l’idée que chacun a droit à un logement, à l’enseignement, à des revenus, à la santé. La marginalité des habitants de caravanes était en contradiction avec les principes mêmes de cet Etat- Providence démocratique.

 

A la fin des années ’60 l’ « Action habitants de caravanes Zwaluwnest » (= Nid d’hirondelle) engagea un travailleur social afin que l’accompagnement administratif social puisse se dérouler de manière structurée.

 

A Anvers on engagea quelqu’un à temps plein à l’ASBL « Keree Amende » afin de décortiquer les problèmes des Tziganes Roms.

 

Les problèmes concernant les lieux pour s’établir connurent un point culminant. Les autorités ne réussirent pas à garantir aux habitants de caravane des droits minimaux d’installation et d’équipement. En 1974 à Mortsel « Bond zonder Naam » exigea un terrain équipé et en 1976 démarra un projet d’enseignement pour enfants Tziganes.

 

5.3. LE GOUVERNEMENT

 

Mais le jeune Gouvernement Flamand s’intéressa également à la problématique sociale et constata notamment que le développement économique ne conduit pas automatiquement au bien-être pour tous.

 

Au point de vue des droits des Nomades les choses s’étaient tout de même mises à bouger. En acceptant une certaine souplesse réglementaire les initiatives que nous venons de citer bénéficièrent alors tout de même d’un soutien financier, même si l’on doit reconnaître que cette intervention financière était minime.

 

En 1975 la fameuse « Carte de Tzigane » disparut. Cette carte était une carte d’identité pour Tzigane, par laquelle les Tziganes étaient inscrits ….-oui, hélas- ….au Ministère de la Justice !

 

Mais l’intérêt du Gouvernement pour le social lui fit ouvrir la boîte de Pandore et les problèmes sociaux -négligés depuis des années- des groupes minoritaires de la population lui sautèrent à la gorge.

 

Le Gouvernement fut obligé de structurer afin que la concertation et les règlements sur les subsides ne lui échappent pas des mains. En 1975 le Ministère de la Culture décida de mettre de l’ordre dans l’organisation des initiatives sociales. Ces initiatives furent classifiées en œuvres d’animation socio- culturelle de type catégoriel, fonctionnel ou territorial. Fédérations et organes de concertation représenteraient (à l’avenir) les différentes initiatives par sous-secteur.

 

5.4. CONCERTATION

 

Les différentes œuvres existantes fonctionnant en faveur des habitants de caravane devaient donc être réunies sous un organe central de concertation. A partir de cet organe central les subsides octroyés seraient distribués aux associations particulières.

 

Les différents travailleurs actifs en faveur des habitants de caravane, surtout des volontaires et des travailleurs organisés en ASBL, comprenaient qu’un regroupement sous un organe central présentait des avantages. Les discussions avec les autorités concernées se dérouleraient de manière plus simple si les intérêts des habitants des caravanes étaient représentés par une organisation unique. Par une meilleure organisation entre les initiatives on atteindrait sans aucun doute de bien meilleurs résultats.

 

Le 19 février 1977 fut créé le « Vlaams Overleg Woonwagenwerk (VOW) (= traduit en français : Œuvre Flamande de Concertation en faveur des habitants de caravane, traduction libre), qui était un organe pluraliste, national, de concertation, appelé à coordonner l’accompagnement culturel et social des habitants de caravane et tziganes. La création de cette Œuvre de concertation eut lieu en collaboration avec les associations affiliées qui luttaient pour la défense des intérêts des Tziganes et des habitants de caravane.

 

En tant que jeune organe de coordination il était important pour le « VOW » de respecter l’autonomie des membres affiliés. Ces organes membres avaient en effet créé une œuvre importante et ils avaient construit une relation de confiance avec le public cible. Le « VOW » soutint ces œuvres et il se chargea du rôle d’instance de contact avec différentes autorités, ainsi qu’avec la presse et le public. La priorité numéro était : la problématique des lieux où les nomades pourraient s’établir.

 

Les subsides octroyés au « VOW » qui malgré des promesses d’amélioration étaient toujours payées à la fin de l’année de fonctionnement, ne permettaient que l’engagement en service d’une seule personne et aussi l’indemnisation d’une partie des frais de fonctionnement de quelques œuvres affiliées et actives en faveur des habitants de caravanes.

 

Deux œuvres travaillant pour les habitants de caravane avaient de leur propre initiative pris à leur service un travailleur pour habitants de caravane et ce travailleur était chargé de l’accompagnement socio-administratif et d’un projet d’enseignement pour Tziganes à Mortsel. Quelques volontaires et des aumôniers dispensés étaient occupés (plus qu’à temps plein) dans le domaine de l’accompagnement des habitants de caravane. La force de l’œuvre en faveur des habitants de caravane résidait surtout dans le grand engagement et la connaissance du groupe cible.

 

Dans les années ’80 furent créés les dits « nep-statuten » (= statuts contractuels peu intéressants). Enfin le secteur social put engager du personnel. Evidemment il ne s’agissait que d’un personnel temporaire et précaire.

 

Les frais de fonctionnement n’étaient pas au programme. Le lien de confiance avec le groupe cible qui exige de la continuité et les frais de déplacement élevés et qui n’étaient pas susceptibles de faire l’objet d’un remboursement empêchèrent le « VOW » de se jeter dans l’aventure des « nep-statuten » (= statuts bricolés, terme péjoratif).

 

Lorsqu’en 1985 le statut Troisième Circuit du Travail fut octroyé pour 5 ans, le « VOW » (= Vlaams Overleg Woonwagenwerk, = Concertation Flamande Action habitants de caravane, traduction libre), le VOW, donc, émit lui aussi un projet qui fut partiellement approuvé. Le VOW put agrandir l’effectif de son personnel de deux unités (2 travailleurs salariés).

 

Après la réforme de l’Etat de 1981 la « Vlaamse administratie »( : Administration Flamande ) fut créée, comprenant une « Administratie Welzijn » (= Administration Bien-Etre). ¨Pour la première fois quelqu’un appartenant aux autorités était habilité à s’occuper de la problématique sur le plan du contenu de cette problématique, même s’il faut reconnaître que les choses ne sont guère faciles lorsqu’une seule et même personne doit se charger de toute la problématique des immigrés tout en ayant même encore la charge d’autres secteurs. Mais au moins à partir de ce moment là le VOW avait au moins un partenaire officiel auprès de l’Autorité Flamande (= auprès du Gouvernement Flamand). Le résultat de ceci fut une première indexation des subsides et en 1983 on obtint également un règlement des subsides en faveur des communes, des C.P.A.S. ainsi que des provinces qui organisaient (ou organiseraient ?) des terrains équipés pour l’installation d’habitants de caravanes.

 

Ces subsides, ainsi que la sensibilisation au problème, le lobbying, la force de persuasion ainsi que les campagnes de presse convainquirent la plupart des communes qui pendant des décennies avait toléré un groupe de familles d’habitants de caravane sur leur territoire, d’assainir les conditions d’habitation des habitants de caravane.

 

5.5. POLITIQUE DE LUTTE CONTRE L’INEGALITE DES CHANCES

 

En 1989 le Gouvernement Flamand décida qu’un montant qui était destiné aux commuines serait réservé à la lutte contre l’inégalité des chances. Les Communes étaient invitées à déposer des projets auprès du « Vlaams Fonds voor de Integratie van Achtergestelden », le Fonds appelé VFIA ou Fonds Lenssens) ainsi qu’auprès du Fonds Van den Bossche. (Vlaams Fonds voor de Integratie van Achtergestelden = Fonds Flamand pour l’Intégration des Personnes Défavorisées, traduction libre).

 

Ce fut presque la première fois que les communes furent en mesure de mener une politique sociale active en faveur des groupes de population socialement fragilisés. Jusqu’alors cela était resté la mission des C.P.A.S. et même lorsque les C.P.A.S. pouvaient s’occuper de ces personnes c’était seulement dans le cadre de l’octroi d’une aide individuelle. Le VFIA fut suivi du VFIK (Vlaams Fonds Integratie Kansarmoede) ainsi que du SIF (Sociaal Impulsfonds).

 

Pour le VOW également la politique de lutte contre l’inégalité des chances menée par le Gouvernement signifia également un nouveau bond en avant. Petit à petit le VOW agrandit encore l’effectif de son personnel en s’ajoutant 4 membres du personnel, qui purent contacter systématiquement les régions et assurer un suivi. La problématique de l’enseignement qui avait été négligée pendant des années bénéficia d’une impulsion par l’attitude engagée de personnes s’occupant de bâtir un enseignement. C’est vrai que cela ne se passa que dans une région limitée mais il devenait possible d’acquérir de l’expérience dans ce domaine. Le VOW eut ainsi la possibilité d’acquérir de la compétence.

 

La « professionnalisation » de l’Action en faveur des habitants de caravane devait également s’affirmer avec persévérance dans l’encadrement structurel qui rendait désormais possible une approche globale, une collaboration solide au point de vue du contenu et de la méthode. Fin 1992 la structure de l’organisation du VOW fut renforcée. Les autorités soutinrent cette initiative par une augmentation substantielle des moyens.

 

Des moyens provenant de l’Europe rendirent possibles d’autres initiatives surtout dans le domaine de l’enseignement.

 

Cependant le VOW ne put élaborer un fonctionnement équilibré. Son potentiel de forces d’hommes et de femmes fut trop hypothéqué par le caractère temporaire des projets et la nécessité d’établir le budget sur base d’une trentaine de petits et de grands fournisseurs de subsides, qui avaient chacun un autre angle de vue. Des déséquilibres dans le fonctionnement, déséquilibres régionaux et déséquilibres de contenu, demeurèrent donc une réalité quotidienne.

 

Le VOW, qui entre-temps est devenu le « Vlaams Centrum Woonwagenwerk, VCW » espère que grâce au décret sur la Politique Flamande à l’égard des minorités ethno-culturelles, un meilleur équilibre pourra être atteint en concertation avec les autorités. En plus de cela une programmation à longue échéance doit acquérir une réelle force de frappe.

 

Les problèmes de marginalité, exclusion, discrimination et fragilité sociale ne peuvent trouver de solution par quelques petits projets sporadiques et isolés, comme le montre bien l’historique ci-dessus. Mais la solution à ces problèmes exige un effort cohérent, intégral, continu et engagé de la part de tous les intéressés.

 

(Le présent texte est une traduction (Bruxelles 04.10.2000, Ministère des Affaires sociales, Administration de l’Intégration sociale) L’original a été établi en néerlandais.)

 

Liens

 

Analyse de l’habitant de roulotte pour la Flandre - Le mode de logement nomade est étroitement lié au mode de vie économique et sociale de l’habitant de roulotte

http://users.telenet.be/ws35421/logement.htm 

Les études Tsiganes

http://www.etudestsiganes.asso.fr/ 

Vers un habitat nomade ? "Habitat(s) - l'Observatoire de l'Habitat", cellule de veille et de prospective sur les évolutions de l'habitat et des modes d'habiter. 

http://www.transit-city.com/habitats/nomade/

 

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